L’Afrique est confrontée à une intensification alarmante des effets du changement climatique, qui bouleversent ses équilibres socio-économiques et fragilisent les populations les plus vulnérables. C’est le constat dressé par l’Organisation météorologique mondiale (OMM) dans son rapport annuel sur l’état du climat dans le continent.
L’année 2024 figure parmi les plus chaudes jamais enregistrées en Afrique, ex aequo avec l’année 2016, et s’inscrit dans une décennie marquée par des températures records. Selon l’OMM, la température moyenne à la surface du continent était supérieure de 0,86 °C à la moyenne de la période 1991-2020. L’Afrique du Nord se distingue comme la région la plus touchée, avec une anomalie thermique atteignant +1,28 °C.
Autour des côtes africaines, les températures de surface de la mer ont franchi des seuils historiques, notamment dans l’Atlantique et la Méditerranée. L’agence onusienne note que la superficie affectée par les vagues de chaleur marines en 2024 est la plus vaste jamais observée depuis le début des mesures en 1993.
Un dérèglement aux conséquences multiples
Les extrêmes climatiques – inondations, sécheresses, vagues de chaleur – ont lourdement affecté les populations. “Le changement climatique reste un problème urgent et croissant sur le continent africain”, a déclaré la Secrétaire générale de l’OMM, Celeste Saulo. Certains pays ont été confrontés à des inondations exceptionnelles liées à des précipitations extrêmes, d’autres à une sécheresse persistante et à une pénurie d’eau.
Le Soudan du Sud illustre tragiquement ces dérèglements. Les inondations des derniers mois ont décimé le bétail, ressource vitale pour des milliers de familles. “Chèvres, vaches et autres animaux d’élevage”, indispensables à la subsistance et aux traditions sociales, ont été emportés, plongeant des communautés entières dans une précarité aiguë.
Dans l’ouest du continent, les inondations provoquées par des pluies torrentielles ont touché quatre millions de personnes. Le nord du Nigéria a été particulièrement frappé : en septembre dernier, 230 personnes ont péri à Maiduguri, capitale de l’État de Borno, et 600.000 autres ont été déplacées. Hôpitaux endommagés, eau potable contaminée dans les camps de fortune – la catastrophe a mis en lumière l’ampleur des failles humanitaires exacerbées par le climat.
Sécheresse historique dans le sud
À l’opposé, l’Afrique australe a connu une sécheresse parmi les plus sévères des vingt dernières années. Le Malawi, la Zambie et le Zimbabwe en paient le prix fort, avec des pertes agricoles majeures. En Zambie, la production céréalière a chuté de 43 % par rapport à la moyenne quinquennale ; au Zimbabwe, le recul atteint 50 %.
Au total, l’OMM estime à 700.000 le nombre de personnes déplacées par les effets du changement climatique sur le continent africain en 2024. Le phénomène El Niño, actif entre 2023 et le début de 2024, a fortement influencé la répartition des précipitations, exacerbant les déséquilibres régionaux.
Le rapport souligne à nouveau la vulnérabilité particulière du continent africain, alors qu’il contribue très peu aux émissions globales de gaz à effet de serre. En effet, l’OMM rappelle que le réchauffement est principalement causé par les pays riches qui brûlent des combustibles fossiles. Dans ce contexte, le défi reste immense : contenir les effets d’un bouleversement climatique de plus en plus brutal, sans disposer des ressources qui permettraient d’y faire face.